poème

Afrique> Nigéria

Ogaga Ifowodo, « The Deluge (22 April 1990) »

(for G.O.O.)

Moments lived upon heartbeats of the Delta
where rivers part into oil and water
segregating stream-flow to farm neither fish nor drink,
such moments can bear a grudge thick and stubborn
like the panting roots of mahoganies.

Moments lived upon the futile till of earth
poisonned by its wealth (which runs every seam
full with oven heat of liquid gold)
so mortally wounding the laughter of barns
and harvests, in the stunned tongues of hoers,
such moments can bear a grudge prickly
and stubbborn like sawblades of elephant grass.

And we see
how veins of a malarial world
overblown like abandoned cows’udders
spill their pain on what patches
of cassava soil there are
so worsening a hostility of rain floods,
of creek-invasion, with the curse of oil :
And what grudge, galled to greenness so long
Avoids the deluge of split skies ?

A fisherman knows the fury of windstorms,
if the turns his wounded brow round about
from the raised masts of trawlers
and finds a tyranny of faith and uniform,
how best to clear an acre of contented living
but by turning fisher of men
whose intemperate breath of acid
wear us thin to thigh bones,
how best but by flushing out of power-bunks
with same gunsmoke as rode them in atop tanks ?      

A map relieved of Sahelian haughtiness
lets life flourish unransomed
to the threat of a pilgrimage to the sea !
in the silences of hearts, of unspoken feared
truths, your new geography finds ovation
only that I fear how I may still share creed
with comrades who with me
are victims of the evil
that unlocked your purse –
in search of a final cure ?

Earth bears the signs of a deluge
in flooded homes, farms and rivers,
even in roads closed by fallen trees,
the aftermath is pure bath
silt and litter swept to sea.  
Moments vécus au rythme des battements de cœur du Delta
où les rivières se séparent en pétrole et en eau
ségrégant des flux d’irrigation impropres aux poissons et à la boisson,
de tels moments nourrissent une rancune tenace
comme les racines palpitantes des acajous.  



Moments vécus sur le futile labourage de la terre
empoisonnée par sa richesse (qui s’écoule aux fissures
de la bouillante marmite d'or liquide)
blessant à mort le rire des granges
et des récoltes, dans les langues assommées des paysans,
de tels moments portent une rancune aiguë
et obstinée comme la lame de scie des herbes à éléphant.





Et nous voyons
comment les veines d'un monde paludéen
gonflées comme des mamelles de vaches abandonnées
répandent leur douleur sur le peu de parcelles
de terre à manioc qui restent,
aggravant ainsi l'hostilité des inondations pluviales,
et le débordement des criques, par la malédiction du pétrole :
Et quelle rancune, ulcérée jusqu’à en devenir pâle,
Évite le déluge de ciels déchirés?




Un pêcheur connaît la fureur des tempêtes,
s'il détourne son front blessé
des mâts relevés des chalutiers
et s’accroche à la foi et à l'uniforme,
quelle meilleure façon de défricher un acre de bonheur
qu’en devenant ce pêcheur d'hommes
dont l’intempérant souffle acide
nous enveloppe jusqu'aux os de la cuisse,
quelle meilleure façon qu’en balayant les puissants
avec les mêmes armes fumantes que celles qui les ont juchés au sommet des derricks ?



Une carte débarrassée de la superbe sahélienne
laisse la vie s'épanouir sans rançon
à la menace d'un pèlerinage vers la mer !
dans les silences des cœurs, des vérités muettes
redoutées, ta nouvelle géographie est ovationnée
et je me demande comment continuer à partager mes croyances
avec des camarades qui avec moi
sont victimes du mal
qui a ouvert ton porte-monnaie –
à la recherche d'un remède définitif ?


La Terre porte les signes d'un déluge
à travers les maisons, les fermes et les rivières inondées,
à travers les routes barrées par des arbres tombés,
avec comme conséquence un pur bain
de limon et de détritus emportés vers la mer.  

(Trad. Xavier Garnier et Cédric Courtois)
Ogaga Ifowodo, Homeland and other Poems, Ibadan, Kraft Books Limited, 1998, p. 25-26.

ENJEU CONCERNÉ

Exploitation pétrolière dans le delta du Niger

AUTRES CRÉATIONS MOBILISÉES

* Helon Habila, « Oil on the Water »
* « The United Niger Delta Oil Co » (Nnimmo Bassey)
* « Oil Rich Niger Delta 2003-2007 » (George Osodi)