poème
Afrique> Gabon
Laude Ngadi, Mavovosse. Les frictions des romanieries. Saint-Denis, Edilivre, 2018, p.44-45.
Urapolis
Si on te parle de l'histoire de Mounana/Tu vas pleurer/Si on t'explique tous les problèmes de Mounana/Tu peux tuer
Mousta/ ou urapolis des mabitas/ la ville où habite la production à l'excès de la pollution/ C'est le Fukushima sans explosion/ la cité de la profusion/ d'uranium et de sa mobilisation/ dans la vibration des murs/ dans le minerai des corps/ dans les néons de la chair/ dans les uranides des nerfs/ dans les radons des artères/ dans le nucléaire des poumons et des coeurs
Mousta/ ou urapolis des mabitas/ ma ville ou réside la non vie/ le phalus de la mondialisation est venu violer/ les profondeurs des terres dans toutes leurs parties/ Le vagin de l'autochtonie/ est resté à chanter/ sans avoir un peu trop compris/ avec ses yeux complètement fermés/ sans être surpris/ avec les pieds comme les supports d'un grenier/ sans émettre le moindre souci. avec les commissures des lèvres remontées comme la bouche qui hume l'odeur/ des WC
Sur la route des mines/ il pleut dans les coeurs brisés/ les caillots noirs du sang versés/ issus de la pollution d'un minerai ostensible à la ruine
La vie de l'uranium/ conduit l'ultimatum de la mort au summum:/ reconstruire dans la chaire polluée des murs et des terrains/ les tissus désolidarisés de la nature et de l'humain/ les risques de disparition de la ville dans les entrailles de la terre/ S'enracinent dans la sédentarité des manoeuvres qui aspirent respirer le vent d'une santé meilleure
Entre les fissures sombres de cette masse des terriers/ en plein coeur de la ville/ où jouent, sur terre et dans les eaux, garçons et filles/ existent un microclimat qui embrase les mineurs méprisés comme des esclaves lynchés
Lorsque les corps respirent la rudesse du vent. flotte dans les poumons un air pollué de sécheresse. polarisation maladive de détresses/ torrents nostalgiques de frustrations et de tourments
Sous les collines, les riches hommes/ paient le silence des pauvres avec d'infimes sommes/ mangent les pieds dans l'eau/ les femmes naviguent à vau-l'eau. sur les décombres des corps noyés sous le lac. sur les déchets industriellement enfouis dans les sacs
Mais peut-être faudrait-il arrêter de faire mine grise/ comme les hommes qui ont donné toute leur vie à cette entreprise/ à moins que les fils ne soient insatisfaits/ du traitement qui leur est fait
Peut-être faudrait-il se taire. comme au centre de la ville ce sage/ peint en blanc debout dans la solitude d'une barrière/ à attendre je ne sais quel présage/ Au fait, qui est-il? Est-ce Bokoko, Dengue, Obamba/ Qui pourra le dire et faire long feu/ depuis que nous a quitté son premier gardien: Maître Feu